Jean La Rue peint et dessine depuis toujours, ou presque. Cette passion lui vient de l’adolescence en fait, mais pas que, car au départ, il voulait devenir architecte. 

 

Cela peut d’ailleurs expliquer sa façon singulière de structurer l’espace pictural de la toile ou celui de la feuille de papier sur laquelle il trace des formes proactives les unes avec (et à travers) les autres dans des constructions métaphoriques édifiant des structures dynamiques et poétiques. 

 

Ce passionné s’exprime par un feu tranquille et constant. Patiemment, il fait son chemin artistique par l’observation et l’expérience comme à l’époque où il était étudiant en droit et qu’il était moniteur de ski à Courmayeur, en Italie, au pied du massif du Mont-Blanc. Sa passion ne se limitait pas au dessin, à l’architecture ou au ski. Il s’initie au parachutisme, à la course automobile avec la Formule 1200 et même au pilotage d’avion. Son désir de repousser les limites s’exprime à travers une certaine retenue, ce qui peut sembler paradoxal, mais Jean La Rue est réfléchi et cette caractéristique se reflète dans sa peinture. 

 

Peintre, il l’est certainement, bien qu’il partage cette passion avec le droit, ce qui à première vue semble contradictoire. Si les univers artistique et juridique semblent s’opposer de par leur nature propre, l’une s’inscrivant par l’imaginaire et l’autre par la rigueur du menu détail, pour Jean La Rue, chacune de ces pratiques nourrit son être intérieur et est alimentée par le même feu. Celui de l’esprit, de la structure, de l’exploration et de la découverte. Derrière les apparences s’anime une rigueur aussi nécessaire que libérée. 

 

ROBERT BERNIER, REVUE PARCOURS.

La Rue tient ce goût pour les arts de son entourage familial: sa mère a fréquenté les ateliers de Frère Jérôme et un oncle militaire, mort a Dieppe, avait étudié à l’École des beaux-arts.

Jeune, La Rue voulait devenir architecte. Il croit que c’est son intérêt pour l’architecture qui l’a amené à s’intéresser autant aux formes géométriques et aux structures qu’on retrouve constamment dans ses tableaux récents.

Il a toujours entretenu une vive curiosité pour tout ce que la vie a à offrir. Étudiant, il a flirté avec la plongée sous-marine, le parachutisme et l’aviation. Il a été capitaine de traversier sur le site d’Expo 67. Il a suivi un cours à l’École de pilotage Jim Russell. Il s’intéresse à la cuisine, est bricoleur à ses heures et joue de la guitare. Après ses études en droit, il a quitté la profession pour aller enseigner le ski pendant deux ans à Courmayeur, en Italie.

Mais tout au long de sa vie, une constante demeure: le dessin. Enfant, adolescent, adulte, il ne cessera de tracer des dessins à l’encre dans de petits carnets, et il le fait encore aujourd’hui. En vacances, on le retrouvera souvent à l’aéroport, dans l’avion ou sur la plage à faire des croquis qu’il offre ensuite à ceux qu’il veut remercier.

Tantôt abstraits, tantôt plus formels, ses tableaux n’ont habituellement rien de réaliste. Il a eu une période 
« oiseaux » et une période « musique », mais le thème était toujours une excuse pour tracer des lignes et construire des formes ou des structures. C’est le fil conducteur.

La Rue affirme qu’il n’aurait peut-être pas persévéré dans son art s’il n’avait pas rencontré des gens qui l’ont inspiré et encouragé. Le nom du docteur Champlain Charest est le premier qui lui vient à l’esprit. Il éprouve pour celui-ci beaucoup de reconnaissance. C’est grâce à lui qu’il a rencontré et connu Jean-Paul Riopelle. Le docteur Charest, passionné d’art et de vin, l’a parrainé pour des expositions au Bistro à Champlain et a fait l’acquisition de ses toiles. Et il a incité l’artiste à délaisser la sagesse pour s’éclater.

J’ai rencontré un homme réservé, doté d’un esprit curieux, faisant preuve de la plus pure authenticité. Un artiste qui manifeste son émotion par le biais de sa peinture. Un peintre qui, malgré qu’il s’adonne à la création d’abord pour lui-même, est quand même sensible au regard approbateur des autres.

MICHEL BEAUCHAMP, extraits d’un article dans MAGAZIN’ART.

La Rue’s interest in art comes from is family background. His mother frequented Brother Jérôme’s workshops and one of his uncle’s, who was in the military and died at Dieppe, had studied at the School of Fine Arts.

As a young man, La Rue wanted to become an architect. He believes this early interest in architecture generated his interest in geometric forms and structures that are a constant in his recent paintings.

He has always been curious about everything life has to offer. As a student he flirted with scuba diving, parachuting and aviation. He was captain of a ferry boat at Expo 67. He studied race car driving at Jim Russell’s school. He enjoys cooking, is handy with is hands and plays guitar. After having finished law school, he left the profession to become a ski instructor in Courmayeur, in Italy, for two years.

One thing though has remained constant throughout is life: is interest in drawing. As a child, as an adolescent and as an adult, he never ceased to fill small notebooks with ink sketches. And, he still does to this day. Even while on vacation, at the airport, in the airplane, on the beach, he’ll be doing sketches that he’ll give to people as a way of thanking them.

Sometimes abstract, sometimes more formal, his paintings are usually not realistic. There has been a « birds » period and a « music » period, but the theme has always been but an excuse for tracing lines and constructing forms and structures. It is the conducting thread.

La Rue affirms that he may not have persevered with is art had he not met people who inspired and encouraged him. Doctor Champlain Charest is the first name that comes to mind as someone to whom he owes great gratitude. He is the one who introduced him to Jean-Paul Riopelle. Passionate about art and wine, Doctor Charest acted as his sponsor for exhibitions at the Bistro à Champlain and also purchased some of his work. He’s the one who convinced the artist to be less contrived and become more spontaneous.

The man I’v had the pleasure to meet is very reserved, has an inquisitive mind and is purely authentic: an artist who expresses his emotion through his painting. An artist who, although he paints primarily for himself, appreciates the approving look of others. 

MICHEL BEAUCHAMP, excerpts from an article in MAGAZIN’ART.

Au début, mon travail était généralement plus minutieux et organisé. J’y allais de traits fins. Puis, le formalisme a laissé de la place à un brin de folie. Des dessins à l’encre noire, je suis passé aux techniques mixtes. Maintenant, parfois, ça bave, ça dégouline. Je me suis mis à explorer, à utiliser tout ce que je pouvais trouver dans mon atelier. J’ai compris que l’art, c’est beaucoup plus que la technique. C’est l’humeur et le geste, l’élan et la retenue.

Mon travail ne se veut pas nécessairement porteur de message. Je ne vise pas la « signifiance ». Je ne cherche pas à exprimer forcément une vision de ma société.

C’est une démarche personnelle qui relève plus de l’instinct que de la préméditation. Mais pas toujours. Parfois, admiratif du travail des autres, je me permets de m’approprier et d’interpréter leurs oeuvres. J’aime être influencé ou même contaminé. Je ne veux pas être monotypique.

Je peins parce que ça me plait et que j’ai besoin de créer.

En ce moment, je suis fasciné par le caractère urbain ou industriel des choses. Le vieux côtoie le neuf. L’ordre se frotte au désordre. On construit, on détruit et on recycle. Partout des traces de l’homme. Les vues se transforment et se déforment. Les matières et les couleurs se marient, se reflètent et se combattent. Les quartiers se succèdent, parfois dans l’harmonie, mais souvent dans le choc.

Demain, ce sera sûrement autre chose. 

Originally, my work was more detailed, more organized. Then, formalism gave way to a little craziness. From black ink drawings, I crossed over to mixed media. I started exploring more avenues, using everything I could find in my studio. Once, only fine lines. Now, also droolings and drippings. Technique, of course. Mood, gesture, impulse and restraint, for sure.

My work is not bearer of message. I do not seek any sort of significance, nor do I try to paint a vision of society. It is a personal approach that rests more on instinct than on a careful premeditation. But not always. I paint because I like to paint and because I have a need to create. Create for the simple sake of creating.

I do not wish to be monotypical. I do not fear influences or even contamination. Interpretation and appropriation are an important part of my approach. 

At the moment, I am fascinated by the urban or industrial character of things. The very old alongside the very new. Order rubbing shoulders with disorder. We build, we destroy, we recycle. Man leaves is trace. Views are transformed and deformed. Matters and colors marry, reflect or fight one another. Neighbourhoods cohabitate, sometimes in harmony, sometimes in a clash.

Tomorrow is another day.